Par un arrêt récent du 11 janvier 2024, la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire vient apporter des précisions quant aux éléments à produire par le locataire pour bénéficier d’un préavis de départ réduit en zone tendue.
Créée en 2013, la notion de zone tendue qualifie les agglomérations à forte densité urbaine où le marché immobilier souffre d’un grave déséquilibre entre l’offre et la demande de logement. En conséquence, le niveau des loyers y est plus élevé qu’ailleurs.
Pour freiner cette inflation, les baux d’habitations sont soumis à deux dispositifs :
- D’une part, le droit du locataire à un prévis d’un mois (logement vide ou soumis à la
loi de 1948) ; - D’autre part, l’application de l’encadrement des loyers (logement vide ou meublé).
Dans le cadre de l’affaire dont a eu à connaitre la Cour de cassation, le locataire avait donné congé à son bailleur en précisant bénéficier d’un délai de préavis réduit à un mois, « conformément aux dispositions de la Loi Alur », et ce en raison d’un rapprochement professionnel.
Le bailleur refusera néanmoins de voir son locataire bénéficier de ces dispositions, et appliquera un préavis classique de trois mois,
Le locataire s’exécutera dans un premier temps, mais agira ensuite en restitution des loyers versés postérieurement au préavis d’un mois, ainsi qu’en paiement de dommages et intérêts.
Par une décision du 19 avril 2022, rendue en premier et dernier ressort, le Tribunal de
proximité de Villejuif fait droit à ces demandes et condamne le bailleur.
Ce dernier forme un pourvoi en cassation.
En substance, le bailleur soutient que la simple invocation de la Loi Alur sans plus ample
justification ne suffit pas à justifier du bénéfice d’un préavis abrégé.
La Cour de cassation tranche la question le 11 janvier 2024, n°22-19.891 :
En premier lieu, elle rappelle d’abord l’article 15, I, de la Loi Alur qui prévoit :
« Lorsqu’il émane du locataire, le délai de préavis applicable au congé est de trois
mois. Le délai de préavis est toutefois d’un mois : […] 1° Sur les territoires mentionnés au premier alinéa du I de l’article 17 [zones tendues] … »
En deuxième lieu, la troisième chambre civile précise ensuite que, contrairement aux
allégations du bailleur, le fait de mentionner l’adresse du bien, et de revendiquer le bénéfice du préavis réduit sur le fondement de la Loi Alur, suffit à justifier du motif invoqué de réduction du délai de préavis.
En dernier lieu, les juges sanctionnent sévèrement la mauvaise foi du bailleur « propriétaire de plusieurs logements qui ne pouvait ignorer que cette commune était située sur l’un des territoires mentionnés à l’article 17 de la Loi du 6 juillet 1986 » en octroyant au locataire l’allocation de dommages et intérêts